Le confinement et la maladie du Covid-19 exposent les aidants et leurs proches fragiles à des situations de stress bien particulières. Pour vous aider à faire face, Aidant attitude et Dorothée Moncel, infirmière d’une équipe mobile d’Accompagnement et de Soins Palliatifs à l’Hôpital Bichat – Claude-Bernard de Paris répondent à toutes vos questions :
1/ L’aidant et le proche sont séparés
-Comment lutter contre le stress lié à la séparation ?
Le confinement est une situation exceptionnelle qui génère de l’anxiété autant au niveau individuel que collectif. Le stress peut être provoqué par l’inquiétude pour son proche, pour sa santé, pour son moral, par le sentiment d’abandon qu’il peut ressentir et aussi par la culpabilité ou les regrets que l’aidant peut éprouver. Il est indispensable d’identifier ses causes afin de pouvoir agir plutôt que de réagir.
Échanger avec d’autres sur ce qui nous inquiète et ce nous voulons changer ou faire évoluer est aussi un bon moyen de trouver des ressources pour faire face.
-Comment soutenir son proche alors qu’il est seul chez lui et que l’aidant ne peut lui rendre visite ?
Rester chez soi actuellement est une contrainte indispensable. Il faut donc accepter que le soutien apporté à son proche ne puisse être idéal. Mais il est toujours possible de continuer de se préoccuper de ses besoins, de ses ressentis, de rester à son écoute sans toutefois se substituer à ses émotions. Il est aussi important de se faire confiance et d’explorer ses capacités à être créatif. En effet, le soutien peut prendre de multiples formes.
Par ailleurs, l’attestation de déplacement dérogatoire rend possible les sorties pour venir en aide à une personne vulnérable. Des visites peuvent donc être envisagées en respectant les mesures de protection. La Croix Rouge française a également mis en place dans beaucoup de régions, des passages de bénévoles pour répondre à certains besoins.
-Comment maintenir le lien avec son proche à distance lorsqu’il comprend la situation ?
Toutes les formes de contacts avec son proche sont les bienvenues : courrier (dans la mesure des distributions), appels téléphoniques, mails, SMS… Les envois de photos, de vidéos et de dessins d’enfants sont également à favoriser. Il peut être intéressant d’avoir des retours d’expérience d’autres aidants.
-Comment maintenir le lien avec son proche à distance lorsqu’il ne comprend pas la situation (maladies neurodégénératives) ?
Au-delà du la crise du Covid-19, il est impossible de savoir avec exactitude ce qu’une personne atteinte de maladie neurodégénérative comprend mais il ne faut pas pour autant renoncer à mettre des mots, expliquer même si on a l’impression que le proche ne comprend pas. La personne perçoit les changements et les émotions, en particulier l’anxiété qui est actuellement très présente. Les échanges peuvent se tenir par téléphone ou par des messages que peuvent transmettre les soignants qui interviennent auprès du malade.
Les associations spécialisées dans les maladies neurodégénératives peuvent également dispenser des conseils disponibles sur leur site ou par téléphone.
-Comment entretenir le contact avec le personnel soignant débordé lorsque le proche est en EPHAD?
Chaque établissement essaye de trouver une organisation pour maintenir le contact avec les familles. Bien souvent des horaires sont définis pour faciliter la disponibilité des soignants. Le matin est en général assez chargé en soins, préférez donc les appels l’après-midi. N’hésitez pas à demander à parler avec les aides-soignantes et les auxiliaires de vie qui se sont occupées de votre proche pour le repas, l’aide à la toilette, etc. Elles sont au plus près de la personne chaque jour et perçoivent les changements. La plupart des soignants aiment leur métier et ont à cœur de l’exercer au mieux.
-Comment gérer un problème ou un conflit avec les soignants ?
Les conflits sont bien souvent liés à des difficultés de communication. Les soignants sont assez mal formés à la communication. Vouloir les meilleurs soins pour son proche est parfaitement légitime et exprimer “ce qui ne va pas” est important. Il ne faut pas hésiter à dire que nous sommes inquiets, ou que certaines choses nous étonnent ou nous déplaisent. Il est important de nommer ses ressentis mais si possible en privilégiant le” je” plutôt que le “il faut” ou “vous devriez”. L’aidant sait ce qui est le mieux pour son proche tandis que les soignants dans les EHPAD sont sous le poids des contraintes liées aux organisations, au manque de personnel qualifié et manquent de temps. Il faut donc tenter de trouver un espace de communication qui n’est pas fait pour juger mais pour s’exprimer et trouver des arrangements.
-Que faire si l’aidant est malade ?
Un aidant malade doit en informer son proche de manière adaptée. Vouloir le protéger en lui cachant la situation peut se transformer en source d’incompréhension et de stress. Le proche aidé va naturellement éprouver de l’inquiétude, mais ceci fait partie de la vie. Les aides à domicile et le personnel des EHPAD peuvent aussi être à l’écoute. De plus, des réseaux de psychologues peuvent être contactés. N’hésitez pas à solliciter de l’aide pour prendre le relais et vous libérer d’une partie de votre charge mentale pendant que vous vous soignez. Les mairies disposent de réseaux pour vous orienter.
-Que faire si le proche est malade ?
Il convient de contacter le médecin traitant ou le médecin coordonnateur de l’EHPAD pour suivre l’évolution de l’état de votre proche ; de discuter des possibilités de visite et de prise en charge par des soignants libéraux ou d’une hospitalisation à domicile (HAD).
En cas d’hospitalisation, il est important de transmettre vos coordonnées aux équipes pour qu’elles puissent vous informer. Mais attention, l’hôpital a été en grande partie réorganisé pour l’accueil des patients atteints de Covid-19 et obtenir des informations peut parfois devenir compliqué. Bien souvent les soignants informent la personne référente ou la personne de confiance lorsqu’elle a été désignée et celle-ci se charge d’informer ensuite l’ensemble de la famille.
-Que faire en situation de fin de vie ?
Les soins palliatifs sont des soins qui visent au meilleur confort de la personne, sans abandon des équipes soignantes quelle que soit la maladie. Ils accompagnent les personnes et leur entourage à leur rythme et dans le respect des singularités de chacun. Toute personne atteinte de maladie grave et évolutive a le droit de bénéficier de soins palliatifs : à l’hôpital par des équipes soignantes avec le soutien des équipes mobiles de soins palliatifs, en ville par les soignants libéraux avec le soutien des réseaux spécialisés. Enfin les unités de soins palliatifs permettent une hospitalisation dans les cas les plus complexes, lorsque les symptômes sont difficiles à gérer ou encore pour que les proches puissent prendre du répit. Le médecin traitant et le médecin spécialiste peuvent demander le soutien d’une équipe mobile ou d’un réseau de soins palliatifs. Lorsque la situation n’a pu être anticipée et en cas de difficultés au domicile comme pour des douleurs importantes, des signes d’inconfort respiratoire ou de détresse, le médecin traitant est l’interlocuteur privilégié. En cas d’indisponibilité de celui-ci, les services d’urgence peuvent être sollicités pour tenter de soulager la personne et éventuellement l’hospitaliser. Les premiers retours d’expériences dans la prise en charge des patients atteints du Covid 19 montrent que les changements sont brutaux et imprévisibles, pour le moment, il est donc difficile pour les équipes de déterminer comment l’état de santé des personnes va évoluer. Au cas par cas et dans les contraintes actuelles les visites peuvent être autorisées.
-Et en cas de décès ?
Il faut également savoir qu’actuellement les obsèques sont encadrées et contraintes : mise en bière immédiate, peu voire pas de présentation du corps, de toilette rituelle ou de soins de conservation, d’habillage en cas de décès lié au Covid. Le nombre de personnes aux obsèques autorisées à assister aux obsèques est également limité.
2/ L’aidant et le proche sont confinés ensemble
-Comment ne pas craquer sans relais ni solution de répit ?
Il est indispensable de ne pas s’enfermer dans la situation qui est certes contraignante mais temporaire. Des soutiens téléphoniques et des forums existent pour exprimer ses difficultés afin de les surmonter. Il s’agit de se faire confiance, de faire appel à sa créativité pour partager des activités communes mais aussi d’être capable de s’aménager du temps pour soi. Personne ne peut être aidant 24h/24, il ne faut pas s’oublier.
-Que faire lorsque les aides habituelles ne viennent plus au domicile ?
Vous pouvez contacter la mairie pour connaître les aides qui restent disponibles. Depuis quelques semaines la solidarité s’organise un peu partout: des aides sont donc disponibles mais encore difficiles à recenser. Par ailleurs, les professionnels de santé libéraux tels que les infirmiers, le SSIAD (Service de Soins Infirmiers à Domicile) et l’hospitalisation à domicile (HAD) restent mobilisés. Les réseaux de santé sont joignables et peuvent vous orienter dans chaque commune ou département.
-Comment éviter de devenir maltraitant en situation d’isolement ?
Il est important de toujours rester à l’écoute de soi et de l’autre. Mettre des mots sur les difficultés évite bien souvent les passages à l’acte et réduisent les gestes de maltraitance. Il ne faut pas hésiter à dire qu’on n’en peut plus, garder ses limites et en avoir conscience. Les aidants parfaits n’existent pas…
-Que faire si l’aidant est atteint du Covid-19 ?
Si vous présentez les symptômes du Covid-19, il faut essayer de s’isoler afin d’éviter la transmission autour de soi. Lorsque l’aidant et le proche dépendant cohabitent et que l’aidant est malade, la transmission est fortement probable car le virus est très contagieux. Il est compliqué d’appliquer les mesures barrières à la maison et de se procurer le matériel de protection : masque, solution hydroalcoolique vêtements lavables à 60°c ou blouses jetables… Le Covid-19 provoque généralement une fatigue importante et le repos fait partie du traitement. Il est donc recommandé de chercher un relais pour s’occuper du proche. Les médecins traitants, les pharmaciens et les professionnels de la ville (Mairie de votre commune, service de soins à domicile, associations…) peuvent vous aider.
En cas de suspicion De Covid-19, le médecin traitant doit être contacté. Un suivi à distance est possible via des applications. Ne composez le 15 que si les symptômes s’aggravent avec des difficultés respiratoires.
Vous pouvez appeler le 0800 130 000 (appel gratuit depuis un poste fixe en France, 7 jours sur 7, de 9 h à 19 h) pour obtenir des informations sur le Covid-19 et des conseils si vous avez voyagé dans une zone où circule le virus ou côtoyé des personnes qui y ont circulé.
Vous pouvez télécharger les outils de prévention destinés aux professionnels de santé et au grand public sur le site de Santé Publique France. Les informations concernant le coronavirus COVID-19 sont régulièrement actualisées sur le site du ministère des Solidarités et de la Santé et sur celui de Santé Publique France.
Les mécènes d’Aidant attitude
Les mécènes d’Aidant attitude contribuent au développement du fonds de dotation, à la fois par des actions de mécénat, mais aussi par la réalisation de projets communs pour les aidants. Sans eux Aidant attitude n’existerait pas, et ne pourrait pas mener ses actions d’information, soutien et réconfort aux aidants.
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