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Psychologue clinicienne et psychothérapeute, Alice Warusfel utilise la méditation dans sa pratique de soin. Elle explique quels en sont les bienfaits à condition de trouver des formateurs compétents et les bonnes formations.

 

Aidant attitude : Comment êtes-vous venue à l’exercice professionnel de la méditation?

Alice Warusfel : J’ai d’abord effectué une démarche personnelle, liée à un travail sur moi-même car je pense qu’il est nécessaire de s’occuper de soi avant de s’occuper des autres ! J’ai vécu une expérience intense et bénéfique avec la méditation, ce qui a ancré quelque chose et j’ai souhaité en faire un outil thérapeutique supplémentaire. Dès 2010, j’ai commencé à orienter des patients vers le psychiatre Christophe André, spécialiste des thérapies comportementales et cognitives (TCC), qui dispensait la méditation de pleine conscience à l’hôpital Saint-Anne à Paris. Le fait que la discipline soit entrée à l’hôpital pour soulager les patients, et entre autres les malades atteints de cancer, a consolidé mon envie d’y revenir, je me suis donc formée aux TCC avant de suivre un cursus de MBCT (thérapie cognitive basée sur la pleine conscience) pour l’intégrer à ma pratique de soin.

 

Aidant attitude : Quel bénéfice les malades peuvent-ils tirer de la méditation et quelles maladies sont les plus concernées ?

Alice Warusfel : Le recours aux techniques méditatives (MBSR (réduction du stress par la pleine conscience) ou MBCT (thérapie cognitive basée sur la pleine conscience)) contribuent à une régulation émotionnelle et une gestion et réduction du stress. La MBSR est davantage présente dans le champ somatique alors que la MBCT a fait ses preuves dans le champ psychopathologique, notamment dans la réduction de la rechute dépressive.

La pratique régulière va, par exemple, permettre d’accueillir et mieux gérer les émotions telles que la colère, la tristesse ou la peur. En oncologie, elle est utilisée pendant et après les traitements et apporte des bienfaits dans la gestion des effets secondaires des traitements, du rapport à soi pour augmenter le niveau de bienveillance envers soi et mieux gérer les peurs comme celle de la récidive. Méditer permet de se recentrer sur soi et ce qui se vit dans l’instant présent. Cet apprentissage progressif permet de s’affranchir du mental qui nous s’assaille en permanence.

 

Aidant attitude : Est-ce une technique qui peut soulager les aidants?

Alice Warusfel : Oui, à condition de pratiquer régulièrement. C’est ainsi que l’on peut en ressentir les effets. La pratique de la méditation de pleine conscience peut permettre aux aidants de libérer un moment pour eux et de ne le consacrer qu’à eux. C’est primordial dans l’accompagnement. Il ne faut pas s’oublier. La méditation permet de s’observer et d’accepter ce qui se présente : pensées, images, sensations agréables ou désagréables sans attendre un résultat en particulier, il s’agit seulement de vivre l’instant présent, de le ressentir et de l’accepter tel qu’il est à cet instant-là. Ne plus être continuellement dans la lutte, peut être très aidant.

 

Aidant attitude : La méditation peut-elle être mal utilisée ou constituer un risque? 

Alice Warusfel : Il existe des DU (diplômes universitaires) ou DESU (diplômes d’études supérieures universitaires) qui sont réglementés mais ne délivrent pas le titre d’instructeur. Alors que des formations permettent d’obtenir cette qualification mais ne sont pas reconnues. C’est ce qui fait toute la difficulté pour s’y retrouver.

Pour pratiquer, je recommande souvent de commencer par un cycle en groupe d’une durée de 8 semaines car cela permet d’installer une pratique régulière, d’échanger et de partager les difficultés que l’on peut rencontrer. Dans la mesure où il peut être complexe de trouver un instructeur qualifié et qu’il existe un risque de dérive, je conseille de se renseigner sur le parcours de l’instructeur et de faire le choix d’un professionnel de santé. Il s’agit d’un moyen plus sûr, s’appuyant sur la réglementation.

 

Aidant attitude : Quels sont selon-vous les usages à respecter pour une bonne pratique? 

Alice Warusfel : Pour une bonne pratique, il faut accepter de s’accorder du temps en qualité d’aidant, ce qui n’est pas toujours simple. Puis d’être « sympa » avec soi, c’est-à-dire cesser de se tyranniser. Pratiquer l’exercice méditatif en commençant par un petit objectif en termes de durée et il progressera avec le temps. Ne pas attendre de résultats, devenir un simple observateur de ce qui se passe en soi sans désir de modifier quoi que ce soit. Pour une fois qu’il n’est pas question de réussir quelque chose mais juste de faire, de ressentir et d’observer, il serait dommage de ne pas en profiter !

 

Aidant attitude : A un niveau plus politique, que faudrait-il selon vous changer ?

Alice Warusfel : Ce qu’il faut avant tout, c’est informer ! Jamais personne n’empêchera quiconque d’avoir recours à une pratique ou à une autre, de tenter l’impossible pour guérir, quitte à se nuire sans le vouloir. Il est donc nécessaire de délivrer une information juste. Comme il est important que les personnels de santé écoutent les attentes et les parcours des patients aussi farfelus qu’ils puissent paraître. Tenter de les dissuader de faire appel à une pratique ou à une autre consiste à fermer la porte au partage des informations ; elles restent pourtant essentielles si l’on veut préserver l’égalité des chances.

 

Propos recueillis par Sandrine Youknovski

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